Des locataires d’un logement insalubre ont arrêté de payer leur loyer pour forcer leur propriétaire à entreprendre des travaux. Ce dernier s’est vengé à sa manière. Propriétaire et locataires ont-ils le droit d’agir comme ils l’ont fait?
Les relations entre locataires et propriétaires peuvent parfois être tendues. Cette histoire repérée par RTL en est le parfait exemple. Depuis trois ans, un couple de quinquagénaires vit dans un logement aux conditions dégradées. « La fosse septique n’a jamais fonctionné, on avait des excréments qui remontaient dans la douche et le propriétaire n’a jamais voulu faire de travaux », explique la locataire. Faute de moyens, le couple ne peut pas déménager. Constatant la dégradation de la maison, la Caf (caisse d’allocations familiales) déclare le logement insalubre et le propriétaire est sommé de faire des travaux.
Une décision qui ne plait pas au propriétaire. Non seulement il ne fait pas les travaux, mais en plus, il menace ses locataires et leur coupe l’électricité, alors que la femme dort avec un « masque à oxygène » selon RTL. Le couple décide donc d’arrêter de payer son loyer de 500 euros par mois, espérant que le propriétaire réagira et réalisera les travaux. Ce dernier réagit, certes, mais pas comme l’espérait le couple. En effet, en représailles, le propriétaire a tout simplement décidé de retirer les portes et les fenêtres! « Comme on n’a plus de porte d’entrée, on a peur qu’il vienne. Alors on surveille tous les deux la nuit, on ne dort pas », explique le couple qui a décidé de déposer plainte.
Mais finalement, qui est en tort dans l’histoire? L’article 6 de la loi du 6 juillet 1989 qui édicte les obligations des locataires et propriétaires rappelle que « le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation ». Le propriétaire n’avait, de toutes évidences, pas respecté cette obligation.
De plus, l’article 226-4 du Code pénal précise que : « L’introduction dans le domicile d’autrui à l’aide de manoeuvres, menaces, voies de fait ou contrainte, hors les cas où la loi le permet, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende ». Le site service-public.fr explique le « propriétaire n’a pas le droit de pénétrer dans le logement loué sans l’accord du locataire. Même en cas d’urgence (dégât des eaux par exemple), le propriétaire ne peut pas entrer dans le logement occupé par le locataire sans son autorisation ».
Pour autant, les locataires n’avaient pas le droit d’arrêter de payer leur loyer. En effet, en s’appuyant sur l’adage « nul ne peut se faire justice à soi-même », l’article 7 de la loi du 7 juillet 1989 rappelle que le locataire est obligé « de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus ». Donc même s’il peut être tentant d’arrêter de payer son loyer dans certaines situations, il est interdit de le faire. En cas de non-paiement du loyer, le bail pourra être résilié et le propriétaire pourra engager une procédure d’expulsion à l’encontre des locataires.
Il existe néanmoins une exception. L’Anil (agence nationale pour l’information sur le logement) précise que si le bien est dans un tel état de délabrement qu’il est impossible d’y habiter, le locataire sera exonéré des paiements du loyer. « Le juge admet l’exception d’inexécution lorsque le locataire se trouve dans l’impossibilité d’utiliser les lieux loués, du fait des manquements du bailleur à son obligation d’entretien, ou lorsqu’il qualifie les lieux d’inhabitables. L’inhabitabilité du logement ne permet pas au locataire d’exercer son droit de jouissance paisible du lieu loué. Elle vaut absence de délivrance du bien ». Avant d’arrêter de payer, le locataire doit faire venir un huissier dans le logement et l’immeuble ou le logement doit faire l’objet d’un arrêté d’insalubrité.
La vie immo – Publié par Céline Bolognesi